Une révolution technologique dans la LNH


Comment se fait-il que la Ligue nationale de hockey (LNH) ne soit pas encore capable de savoir automatiquement quand une rondelle traverse la ligne des buts ? Voilà une question (généralement accompagnée de quelques jurons bien sentis) que tout amateur de hockey s’est posée au moins une fois ces dernières années quand un but est refusé ou contesté par les arbitres, en particulier dans des moments où les enjeux sont élevés, pendant les séries éliminatoires, par exemple. 

Pour qu’un but soit accordé dans la LNH, la rondelle doit traverser complètement la ligne rouge derrière le gardien. Il faut aussi qu’un arbitre ou que les caméras puissent la voir, sans l’ombre d’un doute. Quand le gardien tombe sur la rondelle et que les joueurs s’empilent dans le but dans un brouhaha, ce n’est pas évident, même avec une caméra dans le filet. Ce qui mène parfois à un but refusé qui ne devait pas l’être, et vice versa.

Or, ça devrait bientôt moins sacrer dans les salons d’Amérique du Nord, m’a confirmé un haut responsable de la Ligue, rencontré en marge de la conférence sur les technologies infonuagiques AWS re:Invent 2024, tenue au début de décembre à Las Vegas. C’est que la LNH s’apprête à vivre une véritable révolution technologique, selon David Lehanski, vice-président responsable du développement des affaires et de l’innovation pour la LNH, qui devrait aider à rendre le jeu plus juste, entre autres. 

Voici cinq technologies à suivre dans la LNH, qui pourraient changer l’expérience des amateurs.

Une meilleure analyse de la performance avec la vision assistée par ordinateur

Un nouveau système de caméras est installé depuis peu dans tous les arénas de la LNH pour filmer les parties en trois dimensions. L’un des principaux objectifs : obtenir de nouvelles statistiques, liées par exemple à l’utilisation du bâton dans certaines positions défensives, qui ne pouvaient être quantifiées avant. Celles-ci permettront aux amateurs, mais aussi aux diffuseurs et aux équipes elles-mêmes, de mieux analyser les parties et les performances des joueurs.

Ainsi, la vision assistée par ordinateur transformera les joueurs en bonshommes allumettes, dont les mouvements pourront être analysés par les ordinateurs, un peu comme lorsque les acteurs sont filmés en 3D pour les jeux vidéos.

« Il y a de six à huit nouvelles caméras par patinoire, et elles suivent 25 points sur chaque joueur sur la glace, comme la tête, les épaules, les coudes et la position du bâton », explique David Lehanski.

« Le système est déjà opérationnel, mais nous devons nous assurer que la qualité est constante d’un aréna à l’autre avant de pouvoir le mettre en service et de partager les données avec les équipes, probablement au début de la saison prochaine », précise David Lehanski.

La détection automatique des buts et des hors-jeux

La ligue travaille depuis quelques années à mettre en place un système permettant de détecter quand la rondelle traverse la ligne des buts. « Nous avons essayé avec des puces RFID (NDLR : celles utilisées pour le paiement sans contact, par exemple), mais ce n’était pas assez précis », note David Lehanski.

« Pour l’instant, la technologie la plus prometteuse se sert plutôt de champs magnétiques », avance-t-il. En intégrant des fils dans les poteaux du but et sous la ligne, et en intégrant un anneau métallique dans la rondelle, il est possible de mieux suivre celle-ci qu’avec les autres technologies essayées jusqu’à maintenant.

Cette même technologie, combinée à la vision assistée par ordinateur qui sera lancée l’année prochaine, pourra potentiellement aussi être utilisée pour détecter automatiquement les hors-jeux, lorsqu’un joueur entre avant la rondelle en zone adverse.

« Nous avons à l’heure actuelle une précision d’un centimètre environ, ce qui n’est toutefois pas suffisant », souligne David Lehanski.

Il ignore quand la technologie sera prête, mais il estime son arrivée quelque part d’ici deux à cinq ans.

Des commentateurs épaulés par l’IA générative

Comme la majorité des grandes organisations, la LNH a plusieurs projets en cours par rapport à l’intelligence artificielle générative. Un outil mis à l’essai actuellement avec l’aide de certains diffuseurs combine, par exemple, les données en temps réel de la partie avec des décennies de statistiques de la ligue, pour inspirer les présentateurs à la télé et à la radio. « Si une recrue fait un tour du chapeau, le système peut immédiatement indiquer la dernière fois que cela s’est produit », illustre le vice-président responsable de l’innovation pour la LNH.

La LNH développe aussi un outil d’IA générative permettant de poser des questions, en langage commun, à la base de données statistiques de la ligue — si quelqu’un voulait savoir, par exemple, si être droitier ou gaucher a une incidence sur le rang de repêchage —, mais l’on ne sait pas précisément pour l’instant qui pourra le consulter.

Un meilleur accès aux archives vidéos

La LNH est dotée d’une montagne d’archives visuelles qui sont actuellement sous-exploitées. « Nous avons numérisé toutes les photos et toutes les vidéos dont nous disposons depuis la création de la ligue en 1917. Malheureusement, il est très difficile pour l’instant de retrouver quoi que ce soit dans ces fichiers », se désole David Lehanski.

La LNH veut se servir de la puissance des outils d’intelligence artificielle pour l’aider à analyser et classifier le contenu de ces photos et de ces vidéos, afin de faciliter la recherche dans les archives.  

Il est impossible de dire pour l’instant si le grand public bénéficiera un jour d’un accès direct à ce patrimoine. Par contre, si un record de 1983 était battu pendant une partie, la ligue elle-même pourrait par exemple rapidement diffuser sur les réseaux sociaux les images de la précédente marque.

Des capteurs biométriques pour les joueurs

Pour des raisons contractuelles, la LNH ne peut imposer à ses joueurs le port de capteurs biométriques — pour mesurer le rythme cardiaque ou l’accélération, par exemple — pendant les parties. Ils sont pourtant utilisés dans d’autres sports, notamment au football américain, où les protège-dents des joueurs sont dotés de capteurs qui permettent de mesurer l’intensité des coups reçus à la tête.

« La NFL est vraiment avancée de ce côté, nous apprenons beaucoup de ce qu’ils font », reconnaît David Lehanski. La LNH collabore en ce moment avec l’Association des joueurs de la Ligue nationale de hockey pour imaginer comment une telle technologie pourrait être déployée au hockey, entre autres pour améliorer la sécurité des joueurs, tout en respectant leur vie privée.

« Tout le monde souhaite que les joueurs soient sur la glace le plus longtemps possible et qu’ils aient de longues carrières, rappelle-t-il. Alors nous essayons de voir si la technologie pourra nous aider à y parvenir. »



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