
Des chercheurs japonais ont développé un exosquelette qui permettrait aux pianistes d’améliorer leurs performances et notamment leur dextérité sur des morceaux rapides. Radio Classique a demandé à deux de ses collaborateurs, grands pianistes français, leur avis sur cette innovation.
Des chercheurs japonais de l’Institut NeuroPiano de Kyoto, associés aux Sony Computer Science Laboratories, ont développé un exosquelette qui permettrait aux pianistes de dépasser le fameux « effet plafond », autrement dit le stade auquel certains musiciens ont la sensation de ne pas pouvoir améliorer leurs performances. Selon les conclusions de l’expérience, menée avec 118 pianistes, ce dispositif permettrait d’améliorer sensiblement l’agilité et la vitesse des doigts.
D’après l’article publié en janvier dans la revue scientifique Science Robotics, le dispositif testé lors de séances de 30 minutes a permis de constater un accroissement notable de la vélocité et de la coordination tactile des pianistes cobayes et même des améliorations dans les deux mains malgré l’équipement d’une seule main.
Des tests du cortex moteur avant et après l’entraînement ont également montré que l’exercice produisait des changements neuroplastiques dans le cerveau contribuant à un meilleur contrôle des mouvements des doigts.
Le précédent Robert Schumann
Innovation capitale ou gadget ? Nous avons demandé à deux pianistes professionnels et collaborateurs de Radio Classique – Karol Beffa (classique), intervenant permanent dans l’émission Bande à part, et Laurent de Wilde (jazz), qui anime On the Wilde Side – ce qu’ils en pensent.
Pour Karol Beffa « La plupart des pianistes considèrent, à tort ou à raison, que leur activité relève du domaine de l’art et non de celui de la science et des technologies. Ils risquent d’être d’autant plus perplexes que le précédent Robert Schumann devrait les inciter à la prudence (le compositeur allemand perdit l’usage de sa main droite après avoir mis au point un dispositif mécanique pour améliorer sa dextérité, ndlr).
Si par virtus les Romains désignaient un mérite particulier — la force d’âme —, le musicien virtuose, quant à lui, doit faire preuve d’une habileté peu commune. Jouer toujours plus vite, jouer plus haut (plus aigu…), toujours plus fort… on a l’impression que l’utilisation d’un exosquelette de main robotisé placerait résolument et définitivement la musique du côté du sport de compétition ».
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Laurent de Wilde, comme Karol, cite la méthode de Robert Schumann dont il voit, avec cet exosquelette, « une version 2.0″.Le pianiste de jazz se dit « carrément intéressé » par cette innovation technologique qui pourrait s’avérer « un outil d’entraînement et de perfectionnement très efficace ». Il se verrait bien l’utiliser pour travailler sur les exercices préconisés par Oscar Peterson ou sur les Transcriptions de Martial Solal.
Cette innovation sera certainement commentée ce samedi lors des innombrables événement musicaux proposés à travers le monde à l’occasion de La Journée Internationale du Piano qui se tient le 88e jour de l’année, comme les 88 notes d’un clavier de piano, depuis 10 ans.
Philippe Gault
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